Une fable de Noël déconnectée

Aujourd'hui, Noël ne peut fonctionner sans les kilomètres de fils enfouis sous l’océan, sans les centres de données cachés loin des regards où s’inscrivent en temps réel l’achat des cadeaux et les lettres de souhait. Les plus vénérables se souviennent toutefois d’une époque bien plus ancienne où, pour s’adresser au père Noël, il fallait lui envoyer une lettre par la poste. Du temps de cette ère révolue, jamais il n’aurait été question d’ajouter sa future liseuse Kobo turquoise dans un panier numérique : il était impératif de passer par une requête timbrée en direction du pôle Nord.

La journée où mère Noël fit installer un routeur dans le salon (pour bénéficier d’une réduction sur son Forfait Télévision), le père Noël s’était montré plutôt sceptique : « Pourquoi ajouter un gadget ridicule de plus, avait-il demandé, alors qu’il suffit de syntoniser Canal D ou Radio-Can pour avoir toute l'information ? »

Bien vite, toutefois, le père Noël comprit l’utilité de ce « gadget ridicule ». En moins de quelques semaines, ses lutins lui fabriquèrent un téléphone intelligent, une tablette, une Xbox et un réfrigérateur avec écran intégré. Bien vite, mère Noël avoua son erreur : celle d’avoir connecté son mari.

Cette année-là, alors que la période des fêtes approchait à grands pas et que les employé·es de l’usine du pôle Nord investissaient leurs ateliers, au moment où ses troupes avaient le plus besoin de lui pour répandre la joie auprès des enfants du monde entier, le père Noël disparut dans son sous-sol. Les rumeurs circulaient : « Il passe ses journées sur YouTube », disaient les uns. « Il ne quitte plus sa Xbox », disaient les autres. Certains radoteurs allaient même jusqu’à prétendre qu’il se préparait à lancer sa chaîne BookTok.

La réalité, en revanche, était tout autre. Un soir, alors que mère Noël s’inquiétait pour son mari qui n’avait pas mangé de la journée, elle descendit lui offrir une assiette de biscuits chauds. Tentant de comprendre sa nouvelle dépendance, elle jeta un coup d'œil sur son écran. Une centaine d’onglets de sites de jouets clignotaient. C’est alors qu’elle comprit : si le père Noël passait tout son temps sur Internet, c’était pour s’inspirer dans la confection de jouets pour enfants.

Image générée à l’aide de Magic Media (Canva)

« Cela fait quelques années déjà que je manque d’inspiration pour concevoir de nouveaux jouets et tous ces sites m’aident à développer de nouvelles idées », répondit-il à sa femme, visiblement inquiète.

Mais mère Noël connaissait son mari et savait bien que le problème venait d’ailleurs : « Tu n’as jamais manqué d’inspiration, tu manques simplement de confiance ! Fais confiance à ton imagination débordante. Ce n’est pas les dizaines d’heures que tu gâches à parcourir Internet à la recherche d’idées innovantes qui t’aideront. Allez, il est l’heure de retourner à ton atelier. Et apporte ces biscuits avec toi ! »

Lorsqu’il monta à son atelier, là où des millions de jouets furent conçus au fil des décennies, mère Noël s’accroupit sous le bureau de son mari, à la recherche du routeur, qu’elle déconnecta. « Une pause d’Internet n’a jamais tué personne, pensa-t-elle. »

Que se passe-t-il quand on se prive de connexion ?
Quand on se risque à débrancher son wi-fi, à se mettre en mode Avion ?

Psst ! Avez-vous déjà essayé de voir ce qui arrive quand vous coupez la connexion de votre appareil ?